Diversification alimentaire des tout-petits : comment informer les parents ?

Etape clé dans la vie de l’enfant, la diversification alimentaire est source de nombreuses questions de la part des parents. Les professionnels de santé et de la petite enfance sont des interlocuteurs privilégiés pour accompagner les familles. 

“L’alimentation précoce est un déterminant de la santé future.”

La période de la petite enfance nécessite une attention particulière. En plein développement de ses fonctions neurologiques, cognitives, digestives, de ses capacités orales, le tout-petit est particulièrement sensible à l’effet de son environnement, et notamment de son environnement nutritionnel. L’alimentation joue un rôle fondamental sur le plan physique mais aussi psychique. S’il est désormais bien établi que les premiers mois de vie, incluant la période foetale, impactent la santé à long terme, les recommandations de mise en pratique évoluent avec les connaissances.

La fenêtre de diversification recommandée : entre 4 et 6 mois

Le Haut Conseil de la santé publique (Avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants du 30 juin 2020), recommande de cibler une fenêtre de diversification. ”Afin de réduire le risque d’obésité, d’infections, de maladie cœliaque et d’allergies alimentaires, il est préférable, pour les enfants nés à terme, de débuter la diversification alimentaire après l’âge de 4 mois (révolus). Après 6 mois (révolus), le lait maternel et les préparations infantiles ne permettent plus à eux seuls de couvrir les besoins nutritionnels de l’enfant, ni d’apporter les stimulations nécessaires à son développement. Ainsi, il est préférable de commencer la diversification alimentaire entre 4 et 6 mois (pas avant 4 mois révolus, pas après 6 mois révolus). La poursuite d’alimentation lactée seule après 6 mois n’est pas recommandée.”

Marie Bournez, pédiatre au CHU de Dijon et auteure d’une thèse consacrée aux pratiques de la diversification alimentaire, menée en lien avec le Centre des Sciences du Goût et de l’Alimentation, est intervenue en 2019 lors d’une conférence* organisée par le RéPPOP de Bourgogne Franche Comté. Elle a présenté les résultats préliminaires de l’étude ELFE, l’un des travaux qui ont conduit à l’actualisation des recommandations du Plan National Nutrition Santé (PNNS). 

Elfe est la première étude scientifique d’envergure nationale consacrée au suivi des enfants, de la naissance à l’âge adulte, qui aborde les multiples aspects de leur vie sous l’angle des sciences sociales, de la santé et de l’environnement. Grâce au suivi régulier des enfants, elle permettra de mieux comprendre comment l’environnement, l’entourage familial, le milieu scolaire ou encore les conditions de vie des enfants peuvent influencer leur développement, leur santé et leur socialisation.

Dans ses travaux, Marie Bournez a remarqué qu’une diversification débutée avant l’âge de 4 mois est associée au rajout de sucre et de sel, et à moins de matières grasses, soit un profil moins favorable à la santé future. Rappelons qu’une alimentation lactée exclusive est recommandée jusqu’aux 4 mois du nourrisson, que ce soit par l’allaitement maternel ou par des préparations infantiles spécialisées. Elle constate également que les parents qui ajoutent des matières grasses, rajoutent aussi plus de sucre et de sel que ceux qui n’ajoutent pas de matière grasse, et que cela semble lié aux pratiques culinaires, à savoir ici le “fait maison”. En revanche, pour les parents qui privilégient l’achat d’aliments pour bébé du commerce, il y a moins d’ajout de sel et moins de matières grasses. “Probablement parce qu’il y a dans l’idée que c’est un aliment pour bébé, c’est complet, c’est déjà fait”. Si c’est une bonne chose pour le sel, c’est problématique pour les matières grasses. Elle insiste donc sur le message à faire passer aux parents : ne pas hésiter à rajouter de la matière grasse aux petits pots du commerce. C’est d’ailleurs une des recommandations édictées à la suite des ces travaux dans le dernier Plan National Nutrition Santé.

Les nouvelles recommandations PNNS 4

- Possibilité d’introduire tous les groupes d’aliments, y compris les aliments réputés allergènes, dès le début de la diversification, c’est-à-dire entre 4 et 6 mois
- Introduire de nouvelles textures à partir de 6-8 mois (environ 2 mois après le début de la diversification)
- Ne pas hésiter à proposer un aliment jusqu’à 10 fois, un bébé peut avoir besoin de temps pour l’apprécier
- Ajouter systématiquement des matières grasses dans les préparations maison ou dans celles du commerce qui n’en contiennent pas
- Introduire les produits sucrés à l’âge le plus tardif possible et de manière limitée
- Faire confiance à l’appétit de l’enfant et être attentif aux signes de rassasiement
- Ne pas forcer un enfant à manger
- Etre attentif à l’environnement du repas, en évitant notamment la présence d’écrans

Ces recommandations ont été élaborées sur la base des avis de l’Anses et du HCSP.  

HCSP – Avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants. 2020

Oui au gras !

Contrairement à l’idée reçue qui diabolise le gras, il est indispensable au bon développement de l’enfant. Les parents ne doivent pas avoir peur d’inclure les matières grasses à l’alimentation de leur bébé. Comme le souligne le HCSP : “Les besoins nutritionnels des enfants de moins de 3 ans sont caractérisés par un besoin en lipides plus élevé que celui des adultes, indispensables au bon développement du nourrisson. Le besoin en lipides est en grande partie couvert par le lait maternel ou les préparations de suite dit « 2ème âge » au début de la diversification. C’est pour cela qu’il est recommandé de proposer au moins 500 mL de lait (lait maternel ou de préparation de suite dit « 2ème âge ») jusqu’à au moins 1 an. Au fur et à mesure que la consommation de lait maternel ou de préparations de suite dit « 2ème âge » diminue, les lipides doivent être apportés par l’alimentation solide, notamment les préparations maison auxquelles des matières grasses doivent ainsi être incorporées. Il est également recommandé d’en incorporer dans les petits pots du commerce lorsqu’ils ne contiennent pas de matières grasses ajoutées.”

Eviter la consommation de produits sucrés

A l’inverse, l’ajout de sucre n’est pas recommandé. Les produits “nature”, sans sucres, sont à privilégier. Les fruits peuvent être utilisés pour sucrer naturellement les produits laitiers par exemple. De manière générale,” il est recommandé de ne pas introduire les aliments riches en sucres, de type confiserie, boissons sucrées et jus de fruit, gâteaux, crèmes desserts, crème glacée, poudre chocolatée, ketchup, pâtes à tartiner, miel… et de limiter la consommation de produits sucrés par la suite afin de favoriser des habitudes alimentaires saines à l’âge adulte.” (HCSP) 

Les outils de Santé Publique France

En lien avec la sortie des nouvelles recommandations 2021, Santé Publique France met à disposition différents contenus utiles pour les professionnels dans l’espace Recommandations – Ressources Pros du site mangerbouger.fr

Santé Publique France invite également les professionnels à commander en nombre la brochure « Pas à pas, votre enfant mange comme un grand. Le petit guide de la diversification alimentaire », afin de la remettre aux parents au cours de leurs échanges sur le sujet.

Enfin, Santé Publique France a réalisé une série de vidéos destinées aux parents, disponibles sur Youtube. 

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